si, c'est vrai !

leur écologie et la nôtre

Visionnaire, le philosophe André Gorz avait prévu, dans ce texte paru en 1974, la récupération de l’écologie par l’industrie, les groupes financiers - en un mot, le capitalisme.

Extrait :

Car les partisans de la croissance ont raison sur un point au moins : dans le cadre de l’actuelle société et de l’actuel modèle de consommation, fondés sur l’inégalité, le privilège et la recherche du profit, la non-croissance ou la croissance négative peuvent seulement signifier stagnation, chômage, accroissement de l’écart qui sépare riches et pauvres. Dans le cadre de l’actuel mode de production, il n’est pas possible de limiter ou de bloquer la croissance tout en répartissant plus équitablement les biens disponibles.

Tant qu’on raisonnera dans les limites de cette civilisation inégalitaire, la croissance apparaîtra à la masse des gens comme la promesse - pourtant entièrement illusoire - qu’ils cesseront un jour d’être sous-privilégiés, et la non-croissance comme leur condamnation à la médiocrité sans espoir. Aussi n’est-ce pas tant à la croissance qu’il faut s’attaquer qu’à la mystification qu’elle entretient, à la dynamique des besoins croissants et toujours frustrés sur laquelle elle repose, à la compétition qu’elle organise en incitant les individus à vouloir, chacun, se hisser au-dessus des autres. La devise de cette société pourrait être : “Ce qui est bon pour tous ne vaut rien. Tu ne seras respectable que si tu as mieux que les autres”.

Or c’est l’inverse qu’il faut affirmer pour rompre avec l’idéologie de la croissance : “Seul est digne de toi ce qui est bon pour tous. Seul mérite d’être produit ce qui privilégie ni n’abaisse personne. Nous pouvons être plus heureux avec moins d’opulence, car dans une société sans privilège, il n’y a pas de pauvres”.

André Gorz écrivait cela en 1974…