Dans une conférence donnée au Collège de France en 2017 et portant sur l’habitat du futur, Jean-Marc Jancovici a commencé sa conférence en rappelant quelques informations générales et non spécifiques à l’habitat.
(à 8 minute) Le premier rappel concerne la quantité de gaz à effet de serre (GES) déjà émise et la hausse de températures déjà assurée d’ici 2100.
La quantité de GES émise entre 1850 et 2015 nous assure une hausse de température de plus de 1 degré en 2100, toute autre promesse est un mensonge (exemple : l’accord de Paris qui a fait suite à la COP21).
Le second rappel concerne la marge qu’il nous reste si l’on souhaite rester en dessous des 2 degrés d’augmentation de température.
Rester en dessous de 2 degré, c’est encore possible et cela signifie que nos enfants et petits-enfants (les 2 prochaines générations) ont le droit d’émettre la moitié de ce que nous et nos parents avons déjà émis (les 2 générations précédentes) en terme de GES. Comme ces 2 prochaines générations comportent 3 fois plus d’être humains, chacune de ces 2 futures générations ne doit émettre que le sixième de ce que nous avons déjà émis (les 2 générations précédentes).
Dans la société telle que nous la connaissons depuis la révolution industrielle, 6 fois moins d’émissions de GES signifie 6 fois moins de PIB. Cela constituerait une importante récession. Et comme aucun responsable politique n’envisage d’être élu en promettant une récession, on comprend mieux l’inaction constatée des responsables politiques et leurs fausses promesses.
Si l’on remonte plus loin dans le temps, on constate qu’il y a toujours eu des variation de température et de climat. Mais ces variations étaient 50 fois moins rapides que le changement climatique actuel.
De -20000 à nos jours, la vitesse du réchauffement climatique était d’environ 0,1 degré par siècle. Et l’écosystème d’il y a 20000 ans était totalement différent de l’écosystème d’aujourd’hui, il n’aurait certainement pas pu accueillir plus de quelques centaines de milliers d’êtres humains. Le réchauffement climatique actuel évolue à une vitesse d’environ 0,05 degrés par année, soit 50 fois plus rapidement que depuis 20000 ans.
Par conséquent, le réchauffement climatique actuel nous promet des changements sociétaux importants :
- l’effondrement des systèmes organisés (les pays ou les unions de pays) et un basculement des régimes politiques vers l’autoritarisme
- espérance de vie en forte diminution
(à 20 minutes) L’hypothèse d’un réchauffement climatique en dessous de 2 degrés est encore tenable, mais elle impose d’agir d’ici 2050, c’est à dire d’ici à ce que les enfants d’aujourd’hui soient adultes. Limiter le réchauffement climatique en dessous de 2 degrés implique une division des GES planétaires par 3.
Jusqu’à présent, on est loin de pouvoir envisager atteindre cet objectif : les objectifs de l’accord de Paris signés en 2015 ne sont déjà pas tenus. En effet, les émissions de GES sont en augmentation depuis 2015.
Par conséquent, plus on tarde à mettre en place des actions concrètes, plus il faudra que ces actions soient de grande ampleur. Autrement dit, pour diviser par 3 nos émissions de GES d’ici 2050, il faudra que la baisse soit beaucoup plus rapide si elle commence en 2030 (20 ans de délai) que si elle commence en 2020 (30 ans de délai).
Diviser les émissions de GES par 3 en 30 ans implique de diminuer nos émissions de GES de 5 % par an. Pour bien prendre conscience de ce qu’implique une diminution de 5 % par an, il importe de prendre conscience que - depuis le début du vingtième siècle - il n’y a que 2 années où les émissions de GES ont été en baisse de 5 % :
- la crise de 1929
- l’anéantissement du Japon et de l’Allemagne à la fin de la seconde guerre mondiale
La réduction de nos émissions de GES implique une diminution du PIB, et donc une contraction du pouvoir d’achat. C’est un passage obligatoire.
Quelles que soient nos décisions et nos actions, le système-monde se régulera de lui-même, d’une manière ou d’une autre. Il se régulera soit avec nous, si l’on met en place les actions de réducion de émissions de GES, soit sans nous, c’est à dire par une sélection de facteurs à choisir parmi les 3 principaux facteurs de régulation sociale : l’oppression politique, la famine et la maladie (la guerre étant une forme particulière d’oppression politique).