Robert-Vincent Joule et Jean-Léon Beauvois sont les auteurs d’un livre intitulé petit traité de manipulation à l’usage des honnêtes gens.
Cet ouvrage n’est pas de toute première fraicheur (la première publication date de 1987) mais reste d’actualité tant les techniques de manipulation qu’il dévoile sont toujours utilisées de nos jours.
La publicité est l’art de faire acheter des choses inutiles. En effet, ce qui est utile n’a pas besoin de publicité pour se vendre. La publicité est donc un domaine où la manipulation a toute sa place.
Le sujet de la manipulation dans la publicité est rapidement évoqué dans le livre et éclaire d’un jour nouveau l’utilité de la publicité. Elle servirait non pas tant à séduire au préalable les consommateurs afin qu’ils achètent ce produit mais plutôt à justifier a posteriori l’acte d’achat par ces mêmes consommateurs.
Le consommateur est un acheteur sans état d’âme et dont l’imaginaire de consommateur n’est qu’un après-coup de ses comportements d’achat.
En toute sincérité, ne vous est-il jamais arrivé d’effectuer un achat sans trop savoir pourquoi ? Par exemple : une automobile de telle marque plutôt que de telle autre ? Oui ? Alors vous vous rappelez peut-être que vous vous êtes efforcé, aussitôt après, de trouver des raisons qui attestaient du bien-fondé de votre achat. Et ces raisons où les avez-vous trouvées, sinon dans la publicité ? On peut à ce propos se demander si l’une des fonctions essentielles des images publicitaires, plutôt que d’appâter le client potentiel, ce que l’on proclame, ne serait pas de conforter les clients effectifs dans les comportements d’achat qu’ils ont déjà réalisés, ce qu’on ne dit pas. Si on ne le dit pas, c’est soit qu’on l’ignore, soit qu’on feint de l’ignorer, parce que le dire reviendrait à s’avouer que la qualité des produits ne suffit pas à entretenir leur consommation et, par conséquent, qu’il faut nourrir d’images celui qui vient d’acheter un produit donné, pour des raisons non maîtrisées, afin qu’il persiste dans l’achat de ce produit.
En somme, si la morale est quelque peu bafouée, c’est parce que la technique de vente employée (la manipulation) vous conduit à consommer ni sur la base de votre raison, ni sur la base de vos désirs, mais sur celle d’une technologie des circonstances qui vous prédispose à acheter ceci plutôt que cela.
Par conséquent, si on ne peut pas forcer les consommateurs à acheter, il faut recourir à la persuasion (éventuellement par le mensonge) ou à la manipulation pour arriver à ses fins.
Serait-ce vraiment plus moral d’amener un client à acheter un produit en lui fournissant de mauvaises raisons [donc par le mensonge] que de l’amener à acheter ce même produit en ne lui en fournissant point ? [donc par la manipulation]
On peut relever que la publicité s’accommode très bien du mensonge comme de la manipulation. Le mensonge fait partie des outils de la publicité au même titre que la manipulation, à tel point qu’il est courant qu’une publicité use des 2 techniques et qu’il en devient parfois délicat de distinguer la part de mensonge et la part de manipulation d’une publicité.