Dans un article intitulé une défense peu convaincante des accords commerciaux, Dani Rodrik démonte quelques arguments des promoteurs de ces accords commerciaux.
Il constate avec étonnement que les arguments utilisés se contredisent les uns les autres :
Les objectifs que défendent ces raisonnements sont mutuellement contradictoires. Du point de vue de l’avantage comparatif, les gains issus des échanges commerciaux proviennent des importations ; les exportations sont ce que les pays doivent consentir pour obtenir ces gains. Tous les pays bénéficient de ces gains à condition que les échanges augmentent de manière équilibrée. Les accords commerciaux ne créent pas d’emplois, ils ne font que les redistribuer d’une industrie à l’autre.
Du point de vue mercantiliste, c’est le contraire, les exportations sont une bonne chose et les importations une mauvaise. Les pays qui parviennent à faire progresser leurs exportations nettes gagnent ; tous les autres perdent. Les accords commerciaux peuvent créer des emplois, mais seulement dans la mesure où ils détruisent des emplois dans d’autres pays.
Chaque argument en faveur des accords commerciaux est donc incompatible avec l’affirmation fondamentale de leurs défenseurs voulant que de tels accords puissent à la fois créer des emplois et être mutuellement bénéfiques. Curieusement, les partisans du TPP et du TTIP avancent simultanément ces deux arguments.
Diminution de la souveraineté des pays et atteintes à l’environnement sont des conséquences prévisibles de ces accords commerciaux :
Dans le cas du TTIP, la réduction des barrières commerciales non tarifaires entre les États-Unis et l’Europe restreindra sans aucun doute la capacité des États à légiférer. Même si l’harmonisation des réglementations ne se traduit pas par un nivellement vers le bas, les intérêts des investisseurs et exportateurs porteront plus que jamais préjudice aux objectifs sociaux et environnementaux.
Et le pire pourrait bien être le mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États (ISDS en anglais) :
Dans tous ces domaines, le TPP et le TTIP ressemblent plus à un putsch des entreprises multinationales qu’au libéralisme.
Enfin, il faut garder à l’esprit que la Chine ne fait partie d’aucun des deux projets d’accord commercial avec les Etats-Unis. Habile stratégie géopolitique ?
Négocier ces règles sans la participation de la Chine peut être perçu comme une stratégie visant à amener la Chine à se joindre à un système commercial libéral. Mais cette approche peut également être considérée comme une manière d’isoler la Chine et d’ériger des barrières discriminatoires contre ses marchés lucratifs.
Dani Rodrik réclame un processus d’élaboration transparent et un débat critique ouvert à l’opinion publique.