Dans un article intitulé la cinquième république en coma politique, les auteurs estiment que la cinquième république est d’une telle stabilité qu’elle ne peut pas être démocratique.
La stabilité politique, alpha et oméga de ceux qu’effraye tout changement, se fait trop souvent au prix de l’instabilité sociale. Certes, on peut dire, à l’instar du premier ministre Raffarin, que « ce n’est pas la rue qui gouverne » et que « la politique a justement été inventée pour se substituer à la violence ». Mais ce qui a été inventé il y a plus de deux mille ans par Clisthène pour se substituer à la violence, ce n’est pas la politique en général, mais la démocratie. Et, lorsque la tension sociale s’exacerbe (manifestations répétées et massives, grèves en cascade, etc.), le recours au suffrage universel ne devrait-il pas permettre de trancher les conflits, plutôt que l’oukase présidentiel ? Essentiels, le rapport de forces idéologique et les luttes populaires doivent trouver leur expression dans les institutions, sous peine de les voir surgir sous d’autres formes.
La cinquième république a fait le choix de la stabilité politique aux dépens de la stabilité sociale. Et si les institutions ne sont plus à l’écoute du peuple, alors la voix du peuple se fera entendre autrement.
Peut-il y avoir respect des élus quand ceux-ci ne respectent pas les électeurs ? L’adoption du traité de Lisbonne par le Parlement a ouvert une fracture non refermée. Celle-ci explique sans doute la popularité du référendum d’initiative citoyenne revendiqué par nombre d’associations et de manifestants depuis le mouvement des « gilets jaunes ».
Si la démocratie a été inventée pour se substituer à la violence, alors on est en droit de s’inquiéter de ne plus être en démocratie.