si, c'est vrai !

Adam Smith entre les lignes

S’il est toujours préférable de lire les oeuvres des auteurs qu’on cite, il est parfois nécessaire de se baser sur des résumés, des études ou des interprétations rédigés par d’autres personnes que l’auteur. Il devient alors difficile de détecter les erreurs ou les contre-sens qui ont pu se glisser dans ces études.

Adam Smith est un économiste souvent cité comme fondateur du libéralisme économique. Sa théorie de la main invisible est souvent invoquée pour justifier les mesures visant à accroître l’emprise du libéralisme économique.

Ainsi, on peut lire sur la quatrième de couverture de l’édition de La richesse des nations publiée par Le Monde et France Inter :

Adam Smith développe dans cette oeuvre monumentale la fameuse théorie de la “main invisible” selon laquelle le libre jeu du marché et des intérêts individuels suffit à faire valoir l’intérêt général, sans aucune intervention étatique.

Gilles Raveaud nous propose une analyse novatrice qui tend à démontrer que l’interprétation couramment admise aujourd’hui n’est peut-être pas celle qu’Adam Smith avait en tête lorsqu’il a rédigé son ouvrage.

la démographie en question

Alors que la question démographique est très rarement abordées dans les média (car délicate à traiter), George Monbiot a récemment publié un article sur ce sujet : ce n’est pas la démographie des pauvres mais la consommation des super-riches qui menace la planète.

L’article évite le piège du malthusianisme idiot sans pour autant tomber dans l’angélisme et son propos se rapproche ainsi du livre d’Hervé Kempf : comment les riches détruisent la planète.

de la généralisation de l'usage de la voiture

Aujourd’hui, l’usage de la voiture s’est généralisé et est entré dans les habitudes à tel point que beaucoup d’automobilistes ne conçoivent pas de vivre sans voiture. Nous allons pourtant voir que la voiture, loin de constituer un moyen de transport optimal, présente en réalité de nombreux handicaps.

Certains handicaps sont liés au véhicule automobile en question, d’autres sont liés à notre mode de vie. Mais comme ce mode de vie est rendu possible par l’utilisation de la voiture, ces 2 typologies de handicap n’en forment en réalité qu’un seule.

Nous allons nous intéresser à 3 caractéristiques évoquées dans un billet traitant des alternatives crédibles à la voiture :

  • la masse du véhicule
  • la distance parcourue
  • la vitesse

la masse du véhicule

La masse des véhicules a connu une augmentation régulière au cours de l’histoire de l’automobile. L’effet rebond avait pour conséquence de compenser les gains liés au progrès technologique (amélioration des matériaux, amélioration des techniques de conception et de fabrication…) par des augmentations de dimensions, de la puissance ou du niveau d’équipement du véhicule.

La fiche Wikipedia sur l’automobile nous indique que : “en France, entre 2007 et 2008, la voiture moyenne [pèse] 1253 kg”.

L’INSEE nous apprend que, en février 2007 : “un homme déclare peser actuellement 77 kg en moyenne et une femme 63 kg”.

Enfin, un article promouvant le covoiturage nous informe que : “l’Ile-de-France compte 15 millions de déplacements quotidiens avec un taux d’occupation de 1,3 personne par véhicule”.

En supposant qu’il y a autant de conductrice que de conducteur, on calcule que la masse moyenne de personne transportée est de 91 kg.

1,3 * (63 + 77) / 2 = 91

On en déduit rapidement le rapport de la masse utile transporté sur la masse totale pour une voiture : 6%.

91 / (91 + 1253) = 6%

De son côté une bicyclette (qui transporte généralement une seule personne, soit 70 kg), présente un rapport bien plus intéressant : 87,5%.

(63 + 77) / 2 = 70

70 / (70 + 15) = 87,5%

Quand une voiture se déplace, 6% seulement de la masse totale en mouvement correspond aux conducteurs et passagers. Quand un vélo se déplace, 87,5% de la masse totale en mouvement correspond au cycliste.

Trouvez-vous réellement censé de mouvoir plus d’une tonne de métal avec des hydrocarbures pour déplacer moins de 100 kg utile ?

Cette disproportion se retrouve également lorsqu’on s’intéresse à la puissance des voitures : les moteurs de voiture ont une puissance qui va de 90 à 150 chevaux en moyenne. Certains moteurs peuvent atteindre une puissance de 300 chevaux pour les gros véhicules de 2 ou 3 tonnes comme les 4x4 sportifs (si tant est que la notion de 4x4 sportif ait réellement un sens autre que marketing). Un être humain moyennement entraîné a une puissance de 0,2 chevaux.

la réduction de la distance

Un des axes d’optimisation de l’usage de la voiture pourrait paraître de réduire la distance parcourue en voiture. Ce n’est cependant pas la réduction de la distance parcourue par trajet qu’il faut viser, mais bien la réduction du nombre de trajets. En effet, selon l’ADEME : “1/4 des trajets en voiture font moins d’1 km” et “un trajet en voiture sur deux fait moins de 3 km”.

Un bon nombre de ces trajets pourraient être effectués en vélo. 3 km est en effet une distance bien courte en vélo qui ne nécessite pas plus de 10 ou 15 minutes.

la réduction de la vitesse

Un autre axe d’optimisation de l’usage de la voiture peut sembler de réduire la vitesse de circulation des voitures. La ville de Paris affirme que : “à Paris, la vitesse moyenne du métro est de 27 km/h et celle d’une voiture de 18 km/h”.

Avec une vitesse moyenne de 18 km/h pour les voitures, le vélo est donc généralement un moyen de transport plus rapide que la voiture. La moindre présence de la voiture en ville permettrait d’améliorer la vitesse de circulation des services d’urgence que sont les ambulances, les pompiers ou la police.

une solution : le vélo !

Certes, le vélo bénéficie d’une bonne image mais nombreux sont ceux qui rechignent à emprunter le vélo pour se déplacer. En effet, pédaler demande des efforts physiques, mais surtout, le vélo souffre d’une image négative : le vélo en ville, c’est dangereux !. Or en vérité, de n’est pas le vélo en ville qui est dangereux, ce sont les voitures en ville qui sont dangereuses pour les vélos ! Ce glissement sémantique et syntaxique représente une nuance de taille ! De plus, il apparait qu’en réalité la pratique du vélo n’est pas très dangereuse (à l’inverse de la pratique du 2 roues motorisé) comme le montre ce document de la FUBicy.

En conclusion, on peut certes souhaiter améliorer le fonctionnement des voitures, réduire leur consommation, diminuer les distances parcourues ou encore la vitesse de circulation. Le fait est que les voitures sont congénitalement lourdes, les trajets urbains sont majoritairement déjà très courts, et la vitesse de circulation en ville est déjà faible.

C’est donc la relation de l’être humain à la voiture qu’il convient de modifier. La voiture n’est pas source de liberté, elle est source de dépendance. Il faut chercher à réduire notre dépendance envers la voiture et privilégier l’usage des transports en commun ou du vélo qui ont tous deux un meilleur bilan environnemental et un meilleur rendement énergétique. La qualité de vie de nos villes serait considérablement améliorée si les petits trajets étaient effectués en transports en commun ou en vélo plutôt qu’en voiture.

En définitive, nous serons amenés, volontairement ou non, à réduire nos déplacements, que ce soit en quantité, en vitesse ou en fréquence. Cette réduction étant inéluctable, ne vaut-il mieux pas s’y préparer et y contribuer activement, plutôt que sous la contrainte ?

travailler plus pour payer plus d'impôts !

Plume de presse nous présente dans un très bon billet une étude menée par la fondation Terra Nova. Cette étude porte sur l’évolution des prélèvements obligatoires depuis 2002, elle démonte clairement quelques idées reçues :

Il n’y a pas eu de baisse des impôts en France depuis 2002. La politique fiscale est marquée par une forte baisse des impôts au profit des ménages les plus aisés. Les deux-tiers des baisses d’impôts de la période, soit 20 milliards d’euros par an sur un total de 30, ont été fléchés vers les plus riches. La politique fiscale a été orientée vers la rente, en contradiction avec l’objectif affiché de revaloriser le travail.

Il est heureux de constater que des citoyens comme Plume de presse effectuent un véritable travail de décryptage, à contre courant des média dominants.

la pensée magique

Pour Hervé Kempf, le scientisme[1] est une menace pour notre avenir dans la mesure où il nous amène à chercher notre salut dans toujours plus de science. La pensée magique évoquée par Hervé Kempf trouve son aspect magique dans la certitude que nos espoirs les plus improbables seront comblés par la science, car cette dernière est toute puissante.

Et si ces espoirs n’étaient qu’un pari sur le futur, une sorte d’inconscience incroyablement optimiste (et désespérée) ?

François Rabelais écrivait dès le 16ième siècle “science sans conscience n’est que ruine de l’âme”. N’allez cependant pas imaginer que progrès est néfaste par nature. Comprenez plutôt que le progrès a pour pré-requis la conscience, et donc la réflexion.

Notre salut n’est ni dans le plus, ni dans le moins, mais dans l’autrement.


  1. foi dans la toute-puissance des sciences ↩︎

souveraineté alimentaire

Fin 2007 puis début 2008, l’association Kokopelli a été condamnée dans les procès qui l’opposaient au semencier Baumaux puis à l’état français et à la FNPSPF. Ces procès ont le mérite de mettre en lumière le fonctionnement singulier de la France en matière de semence. Cette singularité s’articule cependant autour d’organisations ou de traités supra-nationaux tels que l’UPOV ou le TIRPAA qui visent à harmoniser les législations nationales.

un cadre règlementaire inadapté

Toute transaction de semences en vue d’une exploitation commerciale de la récolte est assimilée à du commerce. Ainsi, le don et l’échange de semences ne sont pas explicitement interdits mais doivent respecter la règlementation liée à la commercialisation de semences. Cette règlementation impose plusieurs contraintes administratives importantes :

  • l’affiliation du semencier ou de l’agriculteur au GNIS[1],
  • l’inscription de la variété à l’un des catalogues gérés par le GNIS,
  • éventuellement, une protection par un COV.

l’affiliation du semencier ou de l’agriculteur au GNIS

Pour être affilié auprès du GNIS, l’agriculteur ou le semencier verse une cotisation annuelle. Il devient dès lors un acteur économique habilité à pratiquer le commerce de semences, et ce même s’il ne pratique que l’échange ou le don, en vue d’une exploitation commerciale de la récolte.

Ainsi, toute personne souhaitant mettre des semences sur le marché doit verser une cotisation au GNIS.

l’inscription de la variété à l’un des catalogues gérés par le GNIS

Ensuite, pour avoir le droit de commercialiser une variété de semence, cette dernière doit être inscrite à un catalogue, un registre des semences reconnues comme commercialisables. Il existe en France 2 catalogues distincts, tous deux gérés par le GNIS : le catalogue à usage amateur et le catalogue commun des variétés.

le catalogue à usage amateur

Un catalogue à usage amateur a été créé en 1997 pour répondre aux attentes des amateurs. L’inscription d’une nouvelle variété est plus souple et moins chère que pour le catalogue commun des variétés mais elle est réservée à un usage amateur et non commercial.

Les usages qui ne visent pas une exploitation commerciale de la variété sont cependant explicitement exonérées de l’obligation d’inscription aux catalogues, l’inscription à ce catalogue est donc facultative.

Ainsi, la vente de semences pour un usage amateur et la consommation personnelle de la récolte ne vise pas une exploitation commerciale de la variété, elle n’est donc pas conditionnée par l’inscription au catalogue pour usage amateur.

Sur le fond, les procès intentés à l’association Kokopelli visent donc à contraindre l’association à enregistrer les semences qu’elle commercialise au prétexte que l’inscription à ce catalogue à usage amateur est obligatoire, alors qu’elle est facultative ! Un billet de l’avocate de l’association Kokopelli intitulé retour sur un procès perdu revient sur les différentes étapes de cette longue épopée judiciaire[2][3].

le catalogue commun des variétés

Le catalogue commun des variétés existe depuis 1922 et est un sous-ensemble d’un catalogue européen. Il est le plus fréquemment utilisé car il concerne les variétés employées pour les grandes cultures[4] industrielles. L’inscription d’une variété coûte plusieurs milliers d’euros. Le CTPS[5] supervise l’évaluation de la nouvelle variété via une étude menée par le GEVES[6]. Cette étude s’étend sur au moins 2 ans pendant lesquels le GEVES évalue le progrès de cette variété par rapport aux variétés déjà inscrites. Une fois validée, l’inscription est valable dix ans et peut être renouvelée par périodes successives de cinq ans, à la demande de l’obtenteur.

objectifs du catalogue

Lors de sa création le catalogue commun des variété visait à protéger les agriculteurs contre la fraude de certains semenciers et revendeurs. Il est par la suite devenu un outil permettant de défendre les droits de propriété intellectuelle des obtenteurs en définissant les variétés qu’ils souhaitent protéger.

Par ailleurs, l’inscription au catalogue concerne la vente de semences et non leur usage : elle engage et contraint le vendeur. Si une variété n’est pas inscrite au catalogue, le vendeur doit informer l’acheteur que la semence vendue ne correspond pas aux standards d’une exploitation commerciale. Aucune réglementation n’interdit à ce jour de vendre la production issue de variétés non inscrites au catalogue. Elle interdit simplement l’achat des semences de variétés non inscrites si l’objectif est la vente de la récolte issue de la variété.

Les agriculteurs ont encore le droit de sélectionner eux-mêmes leurs propres variétés et ne sont pas obligés de les inscrire au catalogue s’ils ne les commercialisent pas. Le problème est qu’ils n’ont pas le droit d’échanger des semences avec d’autres agriculteurs alors que c’est une condition nécessaire à la pérennité des semences paysannes.

En revanche, les jardiniers amateurs ont encore le droit d’échanger leurs semences librement et ils auraient tort de faire comme si ce droit avait déjà disparu.

procédure d’inscription au catalogue

L’inscription au catalogue commun des variétés est longue et coûteuse car elle nécessite de mener une étude poussée afin de valider la DHS et la VAT (cette dernière n’étant exigée que pour les espèces de grandes cultures).

  • La Distinction Homogénéité Stabilité (DHS) permet de s’assurer des caractéristiques morphologiques et physiologiques de la variété :
    • distinction : variété qui se distingue des variétés déjà inscrites,
    • homogénéité de la variété : homogénéité entre les différents plants cultivés lors de l’étude,
    • stabilité : stabilité dans le temps au fil des générations de plants cultivés lors de l’étude.
  • La Valeur Agronomique et Technologique (VAT) permet de s’assurer de la compatibilité de la variété avec un type d’agriculture considéré (typiquement : l’agriculture industrielle) :
    • la valeur agronomique correspond au rendement de la variété (elle doit être égale ou supérieure à celle des variétés déjà inscrites),
    • la valeur technologique correspond à la conformité aux exigences des filières industrielles de transformation (teneur en gluten des blés, degré de raffinage de la farine).

En résumé, le catalogue commun des variétés est une sorte d’assurance obligatoire à laquelle doivent souscrire les agriculteurs, une garantie de résultat payante qui conditionne cette garantie à la pratique d’un mode d’agriculture industriel. Le cadre règlementaire ne propose aujourd’hui aucune alternative pour d’autres types d’agriculture comme l’agriculture paysanne ou l’agriculture biologique.

En effet, l’agriculture paysanne est une agriculture de petites surfaces et de grande diversité génétique. Ce type d’agriculture ne recherche pas la stabilité de la variété mais, au contraire, sa diversité intra-variétale et sa variabilité dans le temps car elle permettra à la semence d’évoluer dans le sens d’une meilleure adaptation à son environnement.

Il faut cependant mentionner un appel à proposition émanant du CTPS ayant pour objet “la mise au point de méthodes d’évaluation et de dispositifs expérimentaux susceptibles de mettre en évidence l’adaptation des variétés à des diminutions d’intrants”. En ce qui concerne la VAT, le CTPS propose d’effectuer une deuxième série de tests en conditions de faibles intrants en plus des tests déjà existants en conditions de forts intrants. Cette proposition - a priori louable - aurait cependant pour effet de doubler le coût de l’inscription alors que déjà aujourd’hui ce coût ne peut pas être amorti du fait de la faible diffusion de ces variétés. De plus, la majorité des variétés issues de ce type de sélection ne pourrait pas prétendre à l’inscription au catalogue commun des variétés car non conformes aux tests DHS : en effet, leur diversité et variabilité intra-variétale est la condition de leur capacité d’adaptation à des environnements de culture diversifiés et variables avec une faible utilisation d’intrants.

la protection par un COV

Les obtenteurs qui inscrivent une variété au catalogue commun peuvent en outre la protéger par un COV. Ce COV est la preuve de la propriété intellectuelle du semencier sur la nouvelle variété qu’il vient d’inscrire au catalogue. Un COV est une sorte de brevet sur le vivant puisqu’il garantit à son détenteur l’exclusivité de la commercialisation de la variété protégée pour une durée de 25 à 30 années selon les espèces. Il lui permet également d’exiger des royalties sur leur réutilisation d’une année sur l’autre sous forme de semence de ferme.

Contrairement au brevet, il légalise en plus la biopiraterie puisqu’il autorise non seulement la protection de variétés nouvellement créés et sélectionnées, mais aussi celle de variétés anciennes découvertes dans les champs de paysans pour peu qu’elles ne soient pas déjà inscrites. La biopiraterie est inique car personne ne peut se prévaloir de l’exclusivité ni de la paternité d’une semence ancienne, patrimoine de l’humanité et de générations d’agriculteurs.

Les pays utilisant les COV sont regroupés au sein de l’UPOV. La suite de l’article détaillera l’influence de l’UPOV sur les législations nationales.

Les semences des variétés inscrites au catalogue commun mais non protégée par un COV sont dites du domaine public. Elles sont librement commercialisables. Mais en pratique, lorsqu’une variété tombe dans le domaine public, il arrive souvent qu’elle soit radiée du catalogue parce que la maintenance n’est plus assurée par l’obtenteur qui demande alors sa radiation si personne d’autre ne s’engage à en assurer la maintenance.

conséquences de ce cadre règlementaire

Comme indiqué précédemment, inscrire une semence au catalogue commun géré par le GNIS est onéreux et exige de répondre aux normes de DHS et de VAT qui sont des critères adaptés aux seules variétés industrielles, excluant ainsi les petits semenciers et les variétés paysannes traditionnelles ou actuelles. Et ces détails sont la clé de voûte d’un système vicié tant les conséquences qui en découlent sont importantes.

pour les petits semenciers (comme Kokopelli)

  • Interdiction de vendre ou de revendre des semences traditionnelles puisqu’elles ne sont pas inscrites au catalogue commun des variétés. En effet, s’ils achètent des semences d’Europe ou d’ailleurs avant de les revendre, leur fournisseur les leur vendra pour une exploitation commerciale, elles seront donc nécessairement d’une variété inscrite au catalogue commun. En revanche, s’ils produisent des semences eux-mêmes (ce qui est le coeur de métier d’un semencier) mais que ces semences appartiennent à une variété non inscrite au catalogue commun, ils n’ont pas le droit de les vendre pour une exploitation commerciale et ne peuvent les vendre que pour un usage amateur.
  • Impossibilité financière et technique d’inscrire les nombreuses semences paysannes au catalogue car les coûts dépassent la capacité des petites structures.

pour les grands semenciers (comme Monsanto, Syngenta ou Limagrain)

  • Situation d’oligopole sur le marché des semences (ticket d’entrée élevé pour un nouvel entrant).
  • Possibilité d’enregistrer au catalogue commun et de commercialiser des semences non reproductibles (comme les semences stériles et les semences hybrides), et donc de s’assurer un revenu récurrent (marché captif).
  • Possibilité de commercialiser des semences qui nécessitent des intrants et des produits phytosanitaires spécifiques à ces semences (vente liée).

pour les agriculteurs

  • Interdiction d’échanger des semences avec d’autres producteurs car tout échange est considéré comme une commercialisation :
    • soit elles appartiennent à une variété du domaine public mais on leur reprochera de ne pas conserver ses caractères correctement et de ne pas payer leur cotisation au GNIS,
    • soit elles appartiennent à une variété inscrite au catalogue et protégée par un COV,
    • soit elles appartiennent à une variété non inscrite,
  • Impossibilité de fait de produire soi-même ses semences paysannes car cela nécessiterait de fréquents échanges de semences avec d’autres agriculteurs afin de renouveler périodiquement la diversité génétique.
  • Réduction de la diversité biologique : limitation de la majorité des cultures à quelques variétés inscrites au catalogue.
  • Situation d’oligopole sur le marché des semences entraînant un déséquilibre entre les grands semenciers et les petits agriculteurs.
  • Incitation à utiliser les semences les plus productives des grands semenciers et donc à adopter une agriculture intensive nécessitant des intrants chimiques.
  • Dans certains cas, adhésion obligatoire à un club pour pouvoir acheter et utiliser une variété spécifique entraînant une obligation d’écoulement de la récolte auprès de distributeurs associés au club (ce système se généralise aujourd’hui pour les fleurs et les fruits). L’agriculteur devient alors un maillon de la chaine de production , un prestataire de service à qui on vend des semences (en imposant la variété) et à qui on achète la production (en imposant la filière de distribution, donc le prix).

En résumé, la procédure d’inscription des semences au catalogue est coûteuse et inadaptée à la nature des semences paysannes dont l’une des qualités premières est de n’être ni stables, ni homogènes. Cette procédure contraignante a pour conséquence l’interdiction de fait des semences reproduites à la ferme et de leurs échanges pour toute culture dont la récolte serait amenée à être commercialisée.

Il apparaît clairement une volonté de diviser l’agriculture en 2 mondes distincts :

  • un monde industriel, commercial et lucratif monopolisé par l’industrie semencière et chimique
  • un monde amateur, commercialement insignifiant et à but non lucratif

Il n’y a pas de place ici pour une troisième voie, pour une agriculture qui ne soit ni industrielle, ni amateur. Il suffit de se demander à qui profite cette évolution pour avoir une idée des forces d’influence qui poussent à cette mutation.

les semences de ferme

Lorsque l’agriculteur prélève une partie de sa récolte pour réensemencer ses champs, on appelle ces graines des semences de ferme. Or, une semence issue d’une variété protégée et produite par un agriculteur est une contrefaçon si l’agriculteur ne rémunère pas un obtenteur d’une variété communautaire ou s’il reproduit une variété française sans une autorisation expresse, à l’exception du blé tendre. Ces contrefaçons tombent bien évidemment sous le coup de la loi sur la contrefaçon qui garantie les droits des titulaires. Et comme les agriculteurs ne peuvent pas conserver et sélectionner leur semences plusieurs années sans échanges leur permettant de renouveler leur diversité génétique, ils sont obligés d’en racheter régulièrement aux semenciers.

inversion de la charge de la preuve

En France, il est interdit de ressemer une variété protégée par un COV sans rémunérer l’obtenteur, car il s’agit alors d’une contrefaçon. Cependant, pour faire valoir ses droits, l’obtenteur doit prouver que c’est bien sa variété qui a été ressemée dans le champ d’un agriculteur, ce qui est pratiquement impossible car les caractères morphologiques des plantes qui définissent les COV évoluent quand on les ressème. Il est donc difficile pour un obtenteur de distinguer ses variétés de celles de son concurrent.

Les semenciers anglais ont résolu ce problème par un accord privé avec les trieurs à façon qui leur reversent ces royalties qu’ils ont inclues dans la facture payée par les agriculteurs chez lesquels ils ont trié des semences fermières. Mais cet accord reste inefficace lorsque l’agriculteur ne fait pas appel à une entreprise de triage.

Les semenciers français se sont appuyés sur l’Etat pour imposer, par un accord interprofessionnel, le prélèvement de ces royalties baptisées Contribution Volontaire Obligatoire (CVO) auprès de tous les agriculteurs livrant leur récolte de blé tendre à un organisme stockeur agréé et ne pouvant pas prouver qu’ils ont acheté des semences certifiées. Les semenciers collectent ainsi de manière collective leurs royalties avant de se les partager au prorata de leurs ventes. Cela leur permet d’inverser la charge de la preuve : ce n’est plus le semencier qui doit prouver la contrefaçon, ce qui lui est impossible sur la base de la stabilité des caractéristiques physiologiques ou agronomiques définissant le COV, c’est au contraire l’agriculteur qui doit prouver qu’il n’est pas contrefacteur en certifiant l’origine de sa semence.

La CVO est reversée aux entreprises semencières et finance pour une faible part des programmes de recherche publique au profit des mêmes entreprises. Dans tous les cas, l’agriculteur paye une contribution à l’industrie semencière, même s’il a utilisé une variété du domaine public ou qu’il a lui-même sélectionnée, donc normalement non soumise à rémunération d’un obtenteur. Et à payer chaque année la CVO, on comprend que l’agriculteur soit tenté de profiter des avancées potentielles en matière de semence… Cela constitue une forte incitation à s’insérer dans le cadre d’une agriculture industrielle.

Au printemps 2007, les semenciers ont fait voter au Sénat une loi destinée à permettre l’extension de ces accords interprofessionnels à toutes les espèces, mais ils n’ont pas encore réussi à l’imposer au parlement. Pendant les discussions du Grenelle de l’environnement, ils ont cependant fait voter une loi supprimant toute possibilité d’exonérer les semences de ferme des poursuites concernant les contrefaçons. C’est ainsi que toutes les semences de ferme sont désormais susceptibles de poursuites en France sauf celles qui s’acquittent de la CVO, ce qui devrait, selon les semenciers, inciter les agriculteurs à réclamer eux-mêmes le vote de la loi généralisant à toutes les espèces les accords interprofessionnels instaurant le paiement de ces royalties via le mécanisme de CVO.

Finalement, c’est tout le combat de la souveraineté alimentaire qui se joue dans ces règlementations.

les semences hybrides

Les semences hybrides sont devenues un moyen supplémentaire d’obliger les agriculteurs à acheter de nouvelles semences chaque année. Par construction, la semence hybride ne peut pas être reproduite à la ferme, car elle demande deux lignes parentales différentes, qui sont gardées secrètes et surveillées de près par la compagnie semencière. Entre 1930 et 1960, l’ensemble de la principale culture des Etats Unis, le maïs, fut progressivement transformé en variété hybride. Officiellement, les semences hybrides présentaient l’avantage d’un meilleur rendement, elles étaient surtout un moyen d’instaurer un oligopole sur le marché des semences.

le rôle clé de l’UPOV

L’UPOV est une organisation intergouvernementale créée le 2 décembre 1961, à l’initiative de la France et des grands semenciers. L’organisation vise à protéger juridiquement les droits de propriété intellectuelle des obtenteurs au niveau international. Elle regroupe les pays engagés dans la mise en oeuvre de droits de propriété intellectuelle (dont le COV est la déclinaison française). Les membres de l’organisation s’engagent par leur adhésion à participer aux négociations de l’accord de l’UPOV et à transposer cet accord dans leur législation nationale.

accord de l’UPOV 1991

Selon l’accord de l’UPOV 1991, les semences de ferme ne sont plus automatiquement autorisées. Un gouvernement ne peut légaliser des semences conservées à la ferme que par une dispense facultative et uniquement à l’usage de l’agriculteur. Et même dans ce cas, la compagnie semencière a le droit de percevoir des redevances.

Le monopole s’étend aussi à la récolte, et même optionnellement aux produits issus de la récolte. Si la redevance n’a pas été payée sur la semence, le propriétaire de la variété peut demander le paiement au dernier consommateur de la récolte.

En effet, la possibilité de réutiliser des semences de ferme n’a de sens qu’en précisant si cela est autorisé avec ou sans rémunération de l’obtenteur par l’agriculteur. Si cette autorisation est liée à une redevance obligatoire, le métier de semencier se rapproche alors d’une rente où l’obtenteur est rémunéré non pas pour les semences qu’il fournit mais pour les droits qu’il détient sur ces semences. Il perçoit alors une rente de situation sans avoir nécessairement à livrer des semences.

prochain accord de l’UPOV

Le projet du prochain accord de l’UPOV va probablement totalement interdire la conservation de semences des variétés protégées d’une année sur l’autre. Tout comme un brevet, une Protection de Variété Végétale (PVV) donnera au propriétaire un droit de contrôle illimité sur toutes les utilisations de la variété. La possibilité actuelle pour les gouvernements de permettre les semences de ferme comme une exemption nationale va disparaître. En théorie, il y aura encore une possibilité pour les agriculteurs de passer des accords d’autorisation avec les propriétaires des variétés, comme cela existe dans la loi des brevets. En pratique, il est fort improbable que les entreprises semencières renoncent au droit qu’elles auront acquis de contrôler toutes les semences cultivées et à maximiser ainsi leurs profits.

Si l’industrie ne réussit pas à persuader les gouvernements d’interdire complètement de conserver des semences, la solution alternative de repli sera de rendre les gouvernements responsables de la récupération des redevances et de faire du non-paiement un délit. En Europe en particulier, les entreprises semencières sont déjà en train de faire pression sur les gouvernements pour renforcer la législation nationale pour la mise en vigueur des paiements de redevances.

Toute notion d’équilibre entre les droits des semenciers et les droits des agriculteurs, ou de la société au sens large, est absente de ce projet d’accord.

la contradiction avec le TIRPAA

L’accord UPOV 1991 stipule que le droit de ressemer est du ressort de l’état qui peut accorder des dérogations aux agriculteurs. Il s’agit d’une exception facultative, c’est-à-dire que les états signataires peuvent - mais ils ne sont pas obligés - accorder ce droit aux agriculteurs, “sous réserve de la sauvegarde des intérêts légitimes de l’obtenteur”.

Cet accord constitue un relatif flou juridique car il va à l’encontre du TIRPAA, rédigé par la FAO[7] dans le but de conserver la biodiversité. Le TIRPAA reconnaît le droit des agriculteurs de conserver, ressemer, échanger et vendre leurs semences reproduites à la ferme et de participer aux décisions concernant la conservation et à la gestion durable des ressources phytogénétiques.

L’article 9 du TIRPAA reconnaît en effet les droits des paysans à conserver, utiliser, échanger et vendre des semences de ferme. Mais “sous réserve des dispositions de la législation nationale”. Or, dans de nombreux pays, seules les semences industrielles inscrites sur le catalogue national peuvent être échangées.

Les enjeux d’un tel traité pour l’industrie semencière sont considérables. Les entreprises semencières ont besoin des ressources phytogénétiques conservées par les paysans et enfermées dans les banques pour mettre au point leurs variétés verrouillées.

Elles soutiennent donc le développement de banques de gènes ex-situ et tolèrent, dans une certaine mesure, le droit des paysans des pays pauvres de reproduire leurs semences. Pratiquant des agricultures de subsistance, ils ne sont pas solvables. Cependant, elles cherchent à supprimer les droits à reproduire eux-mêmes leurs semences pour les paysans solvables engagés dans l’agriculture commerciale industrielle au sud comme au nord. En effet, l’utilisation de semences industrielles va de pair avec la consommation d’intrants chimiques - engrais et pesticides - qui constituent un marché juteux.

L’accès des paysans aux collections ex-situ peut, dans nos pays, être important pour réussir à redévelopper des semences adaptées, notamment pour les besoins de l’agriculture biologique. Cependant, les banques de gènes restent très souvent fermées aux paysans qui en demandent l’accès.

Le TIRPAA reconnaît “l’énorme contribution que les communautés locales et autochtones ainsi que les agriculteurs de toutes les régions du monde ont apportée et continueront d’apporter à la conservation et à la mise en valeur des ressources phytogénétiques”.

La Via Campesina et d’autres organisations de la société civile ont donc demandé que soit mis en place un processus de consultation et de discussions pour permettre la participation effective de l’ensemble des producteurs d’alimentation et de leurs organisations aux décisions concernant l’application du Traité, et notamment l’application des droits des paysans. L’opposition farouche de la France, de l’Allemagne, de l’Australie et aussi du Canada a bloqué cette initiative.

Ce qui est jusqu’à ce jour un droit deviendrait une exception à la règle. De plus, l’agriculteur qui ressèmerait sa récolte sous dérogation devrait payer une indemnité à l’obtenteur.

la propriété intellectuelle appliquée à l’agriculture

La conclusion du rapport de l’organisation Grain[8] montre bien la finalité de l’application des Droits de Propriété Intellectuelle (DPI) à l’agriculture.

déposséder les agriculteurs et étouffer l’innovation

Quelles seront les conséquences si les compagnies semencières réussissent à imposer leur programme de DPI aux gouvernements membres de l’UPOV ? Les effets immédiats sont évidents. L’interdiction des semences de ferme signifie un transfert d’une valeur considérable des agriculteurs vers les entreprises. Cela sera en particulier destructeur parce, pour la première fois, un changement dans les réglementations de PVV aura un effet direct sur de nombreux agriculteurs dans les pays en développement et les économies pauvres en transition. Il s’agit là de la mise hors la loi d’une grande partie du mode de vie et de la culture des agriculteurs, non seulement en Europe et aux Etats Unis mais aussi dans beaucoup d’autres pays, pour simplement accroître les profits des semenciers.

Les conséquences à long terme sont tout aussi sérieuses mais plus insidieuses. L’histoire de l’industrie des semences montre de manière instructive que l’accroissement de la protection par les DPI n’entraîne pas une incitation mais au contraire un frein à l’innovation et au développement. Les gros progrès dans les rendements et l’amélioration de la résistance au cours du 20ème siècle ont été faits avant que la protection par les DPI soit mise à la disposition des sélectionneurs de plantes, et alors que la plus grande partie du développement des variétés était effectuée dans le secteur public. Et dans tous les cas, ces grands progrès étaient principalement dus à l’effet exceptionnel de la sélection et de la combinaison des meilleurs traits de milliers de variétés de ferme, sélectionnées localement pendant des siècles, et c’était plus une aubaine que le fruit d’une recherche patiente et systématique.

Depuis, la sélection végétale scientifique n’a rien trouvé de comparable. Nous avons vu que dans de nombreux cas des agriculteurs peuvent égaler – ou surpasser – les performances de variétés commerciales présentes par une simple sélection à la ferme. L’industrie des semences a toutes les raisons de craindre la compétition des semences de ferme, non comme ils le proclament, parce que cela menacerait l’innovation, mais parce que cela montre leur absence d’innovation. La sélection commerciale fait en sorte qu’elle est de moins en moins en rapport avec les préoccupations réelles et concrètes de l’agriculture. Sa focalisation actuelle sur des caractères non-durables d’un gène unique dans le meilleur des cas, et ses expériences génétiques carrément dangereuses dans le pire des cas, menacent de laisser l’agriculture très démunie face aux gros enjeux qui l’attendent à l’avenir, comme le changement climatique et la nécessité d’apprendre à nous passer de notre dépendance vis à vis des énergies fossiles.

Constamment renforcés, les DPI sont devenus, comme pour beaucoup d’autres industries stagnantes, la principale défense de l’industrie des semences contre la concurrence. Ce processus est allé maintenant tellement loin que même des analystes très conventionnels commencent à faire remarquer combien la consolidation de l’industrie des semences est en train de réduire la recherche et le développement. L’attaque contre les semences de ferme et la proposition de quasi-élimination de l’accès libre aux variétés pour la sélection végétale illustrent la même tendance. Incapable de produire de la valeur par l’innovation, l’industrie est en train d’arracher le dernier morceau restant du marché des semences aux agriculteurs, et d’augmenter ses gains sur les variétés existantes en bloquant l’accès à la recherche et donc de faire obstruction de manière intentionnelle au progrès dans la sélection.

de l’agriculture paysanne à l’agriculture industrielle

La condamnation de Kokopelli illustre le glissement progressif et continu depuis plus de 50 ans de l’agriculture paysanne vers l’agriculture industrielle. L’agriculture paysanne repose sur la notion de biotope, c’est à dire sur la complémentarité entre la semence et son milieu. Cette symbiose entre la semence et l’humus tend aujourd’hui à être délaissée au profit d’une symbiose d’un autre type : une symbiose entre une semence industrielle et un substrat neutre combiné à des intrants spécifiquement mis au point pour la semence.

C’est ainsi qu’est cultivée la fraise espagnole : sur un sol préalablement brûlé, nettoyé et désinfecté, vide de toute vie micro-organique, alimentée par un simple goutte-à-goutte permettant l’alimentation en eau, en nutriments et en intrants chimiques. Le plan de fraise - capable théoriquement de vivre et de produire des fraises plusieurs années de suite - est systématiquement détruit après chaque récolte. La fraise espagnole aura donc poussé dans un environnement quasi-stérile pendant la totalité de sa courte vie.

Cette agriculture intensive est étroitement dépendante des intrants chimiques, souvent commercialisés par les mêmes grands semenciers. Ce n’est pas un hasard si de nombreux semenciers étaient à l’origine, et sont toujours, des acteurs importants de l’industrie chimique. S’ils arrivent à gagner leur pari de rendre leurs produits chimiques nécessaires à l’agriculture, donc à l’alimentation de l’espèce humaine, ils disposeront alors d’un pouvoir phénoménal : la mainmise sur l’alimentation de l’humanité.

Un autre problème majeur est que la majorité des intrants sont produits à base d’hydrocarbures, qui vont se raréfier et voir leur prix augmenter avec l’épuisement progressif des ressources en hydrocarbures. Alors qu’un récent rapport de la FAO montre que l’agriculture biologique est à même de répondre aux besoins de l’humanité, on est en droit de se demander s’il est bien censé de se rendre encore un peu plus dépendants du pétrole…

le retour à une agriculture paysanne ?

Il est pourtant primordial de conserver une importante diversité de semenciers car elle assure la biodiversité. En effet, les semenciers locaux sélectionnent des semences adaptées au milieu local (conditions climatiques), aux pratiques locales (habitudes et matériels des agriculteurs) et aux usages locaux (variétés adaptées au travail de transformation local et traditionnel).

Par ailleurs, tout agriculteur est potentiellement un semencier pourvu qu’on lui permette d’échanger ses semences avec ses voisins afin d’opérer des croisements et des améliorations de leur variétés anciennes. L’échange est une condition nécessaire à l’amélioration des variétés paysannes par les paysans. C’est précisément l’objet du réseau Semences Paysannes et de l’initiative européenne Farm Seed Opportunities.

S’il y avait une volonté politique de promotion d’une agriculture paysanne, respectueuse de l’environnement, l’état pourrait par exemple décider :

  • de modifier les critères d’inscriptions au catalogue pour les adapter aux variétés paysannes reproductibles,
  • de prendre à sa charge le coût de leur inscription voir de rendre cette inscription facultative,
  • de reconnaître les droits des paysans de conserver, de ressemer, d’échanger et de vendre leurs semences reproduites à la ferme
  • de protéger du biopiratage et des contaminations génétiques les variétés qu’ils ont sélectionnées et conservées.

La souveraineté alimentaire est une facette majeur de la souveraineté d’un peuple. Il est de notre devoir que chacun ait à coeur de défendre la souveraineté alimentaire et prenne conscience de son importance et de sa nécessité.

Ce billet est un peu technique et tire sa substance d’un grand nombre de sources différentes (dont certaines sont listées ci-dessous). Il n’est peut-être pas exempt d’erreurs. Merci de contribuer à la qualité de ce billet en relevant les éventuelles inexactitudes.

Pour en savoir plus…


  1. Le GNIS est un organisme sous tutelle du ministère français de l’agriculture rassemblant les professions de l’activité semencière française. Il est également l’organisme officiel auquel l’état a délégué des missions de service public dans le domaine du contrôle de la qualité et de la certification des semences : le SOC. ↩︎

  2. Question ouverte : au final, pour quels motifs a juridiquement été condamnée l’association Kokopelli ? Pour ne pas inscrire les semences qu’elle commercialise au catalogue commun ? Ou même au catalogue amateur ? Pourtant, l’inscription au catalogue amateur est théoriquement facultative. Alors, quelle est la raison précise pour laquelle Kokopelli a été inquiétée ? Est-ce parce que l’association indiquait que ces semences étaient adaptées à une exploitation commerciale de la récolte ? ↩︎

  3. Autre question ouverte : pour un semencier (comme Kokopelli), à quoi sert le catalogue à usage amateur, si l’inscription est facultative (mais payante) ? Il sert à donner confiance aux acheteurs ? Ou bien a-t-il d’autres utilités ? ↩︎

  4. Le terme de grandes cultures fait référence aux céréales (blé, maïs…), aux oléagineux (colza, tournesol, olivier…) , aux protéagineux (soja, pois…) et autres cultures mécanisées à grande échelle (betterave à sucre, pomme de terre…). ↩︎

  5. Le CTPS est sous tutelle du ministère français de l’agriculture. ↩︎

  6. Le GEVES est un Groupement d’Intérêt Public qui regroupe le ministère français de l’agriculture, l’INRA et le GNIS. ↩︎

  7. La FAO est l’organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture. C’est une organisation spécialisée du système des Nations Unies. ↩︎

  8. Grain est une organisation internationale qui promeut la gestion soutenable d’une agriculture biodiversifiée basée sur le contrôle citoyen des ressources génétiques et des connaissances locales. ↩︎

démocratie ou capitalisme, coopération ou concurrence

Le principe fondateur d’une démocratie est la non domination d’un individu sur un autre, ou d’un groupe d’individus sur un autre. La souveraineté du peuple (et non celle du souverain) est bien résumée par la formule d’Abraham Lincoln : “le gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple”.

A l’inverse, le capitalisme est basé sur les inégalités de richesse : il y a d’une part celui qui dispose du capital, et d’autre part celui qui n’en dispose pas et qui vend sa force de travail.

Là où la démocratie table sur la coopération entre citoyens pour gouverner, le capitalisme privilégie la concurrence entre acteurs économiques pour augmenter les profits.

Quel est le meilleur moyen d’arriver à l’émancipation des individus ?

liberté, égalité, fraternité ?

Liberté, égalité, fraternité est la devise de la république française depuis la révolution française de 1789.

Si cette devise trouve son origine et sa légitimité dans les évènements qui fondèrent notre république française il y a plus de deux siècles, elle a aujourd’hui un petit côté désuet.

  • La liberté est à comprendre au sens de la possibilité de faire tout ce qui ne nuit pas à autrui. Autrement dit, la liberté de chacun s’arrête là où commence celle des autres.
  • L’égalité concerne la loi, dans le sens où la loi est la même pour tous les citoyens.
  • La fraternité est du domaine de la morale et promeut l’entraide entre les citoyens.

Mais on peut aussi interpréter cette devise en analysant l’ordre des mots :

  • Le citoyen est d’abord libre. Mais il est alors libre d’être plus riche que son voisin ?
  • Il doit ensuite être l’égal de son voisin. Mais est-ce une égalité littérale ou seulement une égalité des chances ?
  • Enfin, il doit enfin faire preuve de fraternité envers son voisin. Mais est-ce simplement faire preuve de charité ?

Bref, l’ordre des mots dans la devise de la république française donne une idée de la hiérarchie des normes : liberté puis égalité puis fraternité.

Aujourd’hui, on pourrait très imaginer modifier cette hiérarchie des normes et aboutir à la devise suivante : fraternité, égalité, liberté.

  • Le citoyen doit d’abord faire preuve de fraternité envers son voisin.
  • Le respect de cette première norme entraine naturellement une plus grande égalité entre les citoyens.
  • Le respect de ces deux premières normes permet l’émancipation de chaque citoyen et donc une plus grande liberté.

Cette vision des choses est bien évidemment naïve et illusoire à l’heure où l’individualisme et l’égoïsme prennent bien souvent le pas sur l’esprit de fraternité.

Alors continuons de rêver et allons jusqu’à changer les mots de la devise de la république française :

  • Remplaçons fraternité par solidarité qui exprime bien plus clairement la solidarité dont doivent faire preuve les citoyens entre eux.
  • Remplaçons égalité par équité car il est plus équitable que chacun donne à la hauteur de ses moyens et reçoive à la hauteur de ses besoins.
  • Enfin, conservons la liberté qui reste une valeur important si elle est bornée par la solidarité d’une part et par l’équité d’autre part.

Revendiquons alors cette nouvelle devise pour notre république française : solidarité, équité, liberté !

devenir un vrai écolo ?

Alors que nous sommes de mieux en mieux sensibilisés à la problématique écologique, il apparaît qu’il est difficile de s’engager dans une démarche résolument écologique. Si les premiers pas écologiques sont faciles à faire, ceux qui suivent imposent de se remettre en cause plus qu’on ne le souhaiterait. On risque alors de se retrouver désillusionné et découragé, en se disant “Je n’arrive pas à être écolo”.

En effet, une démarche résolument écologique implique de s’attaquer aux tabous occultés par notre société.

Ce n’est qu’au prix de cette remise en cause qu’on parviendra à avancer réellement, individuellement et ensemble.